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Une ligne de train pour l’Arctique?

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  • 29 janv. 2019
  • 4 min de lecture

Alors qu’Aurélie et moi préparions notre périple vers la capitale arctique, nous avons était très surprise par l’impossibilité de s’y rendre en train. Bien que nombreuses, les seules alternatives demeurent aujourd’hui le bus, la voiture ou bien le bateau. Tromsø est ainsi l’une des trois plus grandes villes européennes dépourvue d’un service ferroviaire!


Pourtant, le débat a ressurgi l’an dernier alors que le gouvernement norvégien s’apprêtait à faire voter au parlement le nouveau Plan de Transport National (PTN). Le projet a été examiné sous différents angles, avec une attention particulière sur la portée socio-économique et environnementale que de telles infrastructures pourraient impliquer. À la suite d’intenses débats, la construction d'une ligne ferroviaire arctique (« Arctic Railway ») fait désormais partie des projets mentionnés dans le PTN 2018-2029.


Quel était le projet initial ?


Le plan initial rejeté par le gouvernement norvégien au début des années 1990 concernait l’extension, de Fauske (Bodø) à Tromsø, d’une ligne de chemin de fer déjà existante (Oslo-Bodø). L’ambition de combiner le transport de passagers et de marchandises fut cependant à l’origine de son échec. Dans une étude réalisée par la NSB (compagnie ferroviaire norvégienne), le comté de Troms était trop faiblement peuplé et économiquement peu attractif. La NSB affirma à l’époque que l’investissement requis pour les travaux ne serait jamais amorti par la fréquentation de la ligne.

Directorat Ferroviaire Norvégien


Le débat fut délaissé ces vingt dernières années, et lorsqu’il fut médiatisé à nouveau l’an dernier, la ville de Tromsø, pourtant cinquième ville du pays avec près de 70,000 habitants, n’apparaissait plus comme une évidence pour accueillir la nouvelle ligne de chemin de fer.


La ville fut pourtant ardemment défendue par les populations locales ainsi que le candidat libéral du comté aux dernières législatives, Morten Skandfer. Il considère ce projet comme une alternative éco-responsable mais surtout comme une véritable opportunité de désenclavement et de re-dynamisation économique de la ville. Il conteste vivement l’argumentaire et les études qui ont plongé le projet dans l’oubli au début du siècle. Dans une interview pour le Barent’s Observer, il affirme que Tromsø « devrait multiplier par cinq sa production de pêche et d’aquaculture d’ici 2050. Ces denrées doivent être transportées en dehors de la région. Le train est la meilleure solution à cela! »


Des études ont récemment insisté sur l’avantage commercial qu’apporterait la construction d’une nouvelle ligne de chemin de fer traversant le région Arctique. Jusqu’à présent, le nord de la Norvège n’est relié qu’à la Suède via l’Ofotbanen qui s’étend de Narvik à la frontière suédoise (Riksgränsen). Plutôt qu’une liaison avec le sud et l’est du pays, une connection entre la Finlande, la Suède et la Russie est aujourd’hui privilégiée. Les gouvernements des pays nordiques sont en effet désireux d’exploiter le potential économique des ressources halieutiques au large de la mer de Barent.


Quelle route arctique choisir?


Rapport Norconsult (cf. références)


En Janvier dernier, Norconsult, un cabinet de conseil et d’expertise norvégien, a rendu public un rapport examinant la rentabilité d’une ligne arctique qui relierait le nord du pays à la Finlande. Ce dernier fut commandé conjointement par les Ministres des Transports norvégien et finlandais ainsi que des agences d’Etat spécialisées sur la question (le Jernbanedirektoratet et le Liikennevirasto). Différentes alternatives furent étudiées: Tornio – Haparanda – Kiruna – Narvik ; Kolari – Kiruna – Narvik ; Kolari – Skibotn Tromsø ; Rovaniemi (Kemijärvi) – Kirkenes et Rovaniemi – Kemijärvi – Murmansk.


Dans le cadre des enquêtes menées par Norconsult, le Directorat Ferroviaire Norvégien (Jernbanedirektoratet) a organisé en Janvier dernier deux rencontres à Tromsø. Le 16 Janvier, plusieurs groupes d’intérêt ont été conviés à un premier rassemblement (municipalités, organisations locales, entreprises) visant à débattre des modalités du projet. Bien que l’ensemble des acteurs locaux se soient montrés favorables à sa réalisation, des dissensions ont émergé à propos du tracé de la ligne, chacun des acteurs cherchant à défendre l’aire géographique qu’il représentait. Ces désaccords montrent à quel point la ville choisie pour accueillir ce nouveau service bénéficiera d’importantes retombées économiques. Une deuxième rencontre a été organisée à la fin du mois avec le Parlement Sami (peuple indigène au nord de la Norvège, la Suède, la Finlande et la Russie) qui a exprimé de sérieuses réserves quant à la réalisation de ces infrastructures. Ses représentants craignent que la construction et la vitesse des trains n’aient des conséquences désastreuses sur leurs pâturages, le patrimoine naturel de la région ainsi que leurs secteurs d’activités traditionnels (élevage de rennes, agriculture, pêche).


Enfin, la ligne de chemin de fer ne sera pleinement utile que si elle est combinée aux infrastructures fluviales de la région. Jusqu’à présent le fret est majoritairement assuré via le réseau routier. Mais à l’avenir, on peut envisager que les containers qui transitent au-delà du cercle polaire soient acheminés par voie maritime pour ensuite être distribués par train vers le reste de l’Europe. Cela permettrait de désengorger l’axe de communication unique vers le nord du pays mais également d’assurer un transport de marchandises plus écologique.


Pour accueillir ces containers, Tromsø devrait moderniser son port, ce qui représente un coup colossal de plus de 30,000 Millions de NOK (travaux du port et construction de la ligne inclus) contre seulement 10,000 Millions de NOK si la connexion débutait à Narvik, ville disposant déjà des infrastructures nécessaires grâce à l’Ofotbanen. Bien que trois fois moins peuplée (près de 20,000 habitants), la ville de Narvik s’impose comme l’alternative la moins coûteuse! Le projet demeurant très coûteux, la Ministre finlandaise des Transports estime qu’une aide de la part de l’UE est envisageable dans la mesure où la ligne profiterait commercialement à l’ensemble de ses pays membres. Torius Kleiven Kandal, représentant de la Norvège du Nord à Bruxelles, n’a pas tardé à confirmer l’éligibilité du projet à un financement de la part de l’UE, en précisant que « l’Europe apprécie s’engager davantage dans la région Arctique », perçue comme un carrefour commercial d’avenir.


Le projet est aujourd’hui en « stand-by », et au vu des études menées récemment, la ville de Tromsø risque fort d’en être écarté. Si cette ligne voit le jour, elle entraînera une recomposition décisive des forces économiques de la région. La ville de Narvik, encore hantée par les souvenirs de la Seconde Guerre mondiale, pourrait bel et bien s’imposer dans un futur proche comme le nouveau coeur économique émergent de la région.



Références:


  • https://www.newsinenglish.no/2017/03/02/transport-projects-get-historic-boost/

  • https://www.newsinenglish.no/2016/03/23/roadblocks-ahead-for-transport-plan/

  • https://www.stortinget.no/no/Saker-ogpublikasjoner/Publikasjoner/Innstillinger/Stortinget/1993-1994/inns-199394-133/3/

  • https://thebarentsobserver.com/en/industry-and-energy/2017/03/government-initiates-tromso-railway-study

  • https://julkaisut.liikennevirasto.fi/pdf8/norconsult_arcticrailway_web.pdf

  • https://www.lifeinnorway.net/arctic-railway/

  • https://www.railwaypro.com/wp/norway-study-new-rail-link/

  • https://standbynordic.com/new-railway-in-nordic-arctic-discussed/

  • https://naturvernforbundet.no/samferdsel/en-gledens-dag-for-nord-norge-article36608-139.html















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